Le somnifère qui rend obsédé sexuel et amnésique. Déconseillé aux asthmatiques, provoque des arrêts respiratoires associé à d'autres médicaments
Au-delà de la recherche de la performance, le mode de vie des coureurs favorise leur toxicomanie. Dernière trouvaille: le Stilnox
Même au repos, les coureurs cyclistes se défoncent. Leur drogue de choix: le Stilnox. Il ne s'agit pas d'une substance dopante mais d'un somnifère. Ce médicament, fabriqué par Sanofi-Synthélabo et délivré sur ordonnance, est pourtant devenu un «must chez les pros du peloton cycliste. Une étude du psychiatre Jean-Christophe Seznec, publiée dans les Annales médico-psychologiques, le confirme de façon édifiante. «Ingéré au cours de fêtes, entre deux étapes, le Stilnox était alors absorbé à grandes doses, souvent avec de l'alcool, explique le Dr Seznec. Les coureurs recherchaient ses effets paradoxaux comme de forts sentiments d'ébriété.» Le Dr Seznec a réalisé son enquête, pour le compte d'une équipe cycliste, à partir d'entretiens individuels. Le rapport était resté totalement anonyme, jusqu'à ce que le quotidien L'Equipe révèle le nom du groupe cycliste commanditaire de l'étude: Cofidis. «Quand on prend une dizaine de comprimés, cela permet d'accéder à un état d'euphorie, raconte un jeune professionnel. Et, le lendemain, on ne se souvient de rien.» Cet hiver, plusieurs coureurs de Cofidis allaient jusqu'à sniffer une poudre blanche maison: des pilules de Stilnox concassées et mélangées à de l'éphédrine. «Peu importe le produit, assure le Dr Seznec. Aujourd'hui, le sportif de haut niveau, souvent en souffrance, développe une relation pathologique au médicament qui peut être assimilée à une forme de toxicomanie.» Cette «toxicologie de la gagne» dépasse le cadre de la tricherie puisqu'elle provoque des troubles du comportement, pendant et - souvent - après la carrière sportive. Décédé d'une overdose de cocaïne, le 14 février, le cycliste italien Marco Pantani s'inscrit dans cette spirale mortifère.
Le Dr Seznec a baptisé ce comportement le «syndrome colonie de vacances». Le mode de vie des cyclistes s'organise en effet hors de la réalité, autour des courses qui remplissent leurs journées. Quel que soit le lieu, l'activité physique, le rythme de la journée, l'entourage et les chambres d'hôtel sont les mêmes. Le soir, libérés des obligations sportives et familiales, les coureurs dérivent. «Cette situation discordante autour d'une errance organisée provoque une perte de repères et d'identité, note le Dr Seznec. Lorsqu'ils sont en compétition, les cyclistes se laissent aller, car ils ne sont plus dans la vraie vie.» D'où certaines pratiques déviantes et inquiétantes: déféquer en plein milieu de la nuit dans le hall d'un hôtel, rouler pendant des kilomètres pour trouver une prostituée, voire sauter d'un étage élevé, dans un état second.