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http://contre-pied.blog.lemonde.fr/2010/02/17/vancouver-9-%e2%80%93-pour-le-cross-aux-jeux-d%e2%80%99hiver/
Comme c’est loin Vancouver, de Whistler. Les échos des bosses, du snowboard et les crissements des patins sur la glace ne nous remontent que par le truchement de la télévision, comme si nous étions à Paris – mais sans les commentaires de nos amis de France Télé -, ou par le témoignage des courageux qui ont fait les trois heures de navette pour Vancouver, et retour, afin d’aller assister au naufrage de Brian Joubert. Ce grand écart entre les sports de neige et ceux de glace, entre les pratiques à skis et celles à patins se creuse un peu plus à chaque édition et si les Jeux d’hiver sont au pluriel, c’est qu’il y en a au moins deux, qui ne se croisent jamais et se déroulent presque à l’insu l’un de l’autre. Nagano avait été un sommet en la matière, Turin a prolongé la tendance, Vancouver la confirme, Sotchi pourrait l’accentuer.
Cet éparpillement, que le CIO prétend combattre, n’est qu’une des incongruités de Jeux d’hiver qui auraient parfois besoin d’un lifting de printemps. Pas question de hiérarchiser les pratiques sportives, toutes ont leur spécificité, leur intérêt, leurs artistes et leurs vedettes. A ne retenir que l’audience mondiale d’un sport, on sacrifierait rapidement tout au foot et à la NBA… Une compétition de biathlon ou de combiné nordique doit être vue en vrai. C’est un superbe spectacle proposé par de formidables athlètes.
Mais on entend ici et là s’élever des voix qui s’étonnent de la présence aux Jeux de disciplines pratiquées par quelques centaines d’individus, et dont l’audience ne peut être que limitée à un petit groupe d’experts et de pays. Cela est vrai également pour certains sports d’été. Ainsi, on peut se demander pourquoi le curling et pas la pétanque, ou les bowls britanniques qui figurent au programme des Jeux du Commonwealth. Et surtout pourquoi cette absence d’un authentique sport d’hiver, parmi les plus pratiqués au monde, qu’est le cross-country.
Pour le cross
En mai dernier, la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF), avec l’appui de stars du fond comme Haile Gebrselassie, a officiellement demandé au CIO cette inscription au programme des Jeux d’hiver du cross, qui fut disputé pour la dernière fois aux Jeux de Paris en 1924. La moitié seulement des 38 engagés termina, tant la chaleur était torride et la pollution à son comble.
A cette requête, le CIO a répondu que les Jeux d’hiver devaient se cantonner aux sports de neige et de glace, mais quiconque a pataugé dans la gadoue au milieu de dizaines d’autres coureurs transis sait très bien que le cross remplit souvent ces deux conditions météo… En outre, il permettrait aux Jeux d’hiver d’être un peu plus que le sport du quart de la planète où il fait froid. Avec le réchauffement climatique, ils seront bientôt des Jeux de happy few. Le cross aurait le mérite d’attirer des athlètes africains, sud-américains, asiatiques, des pays du Sud laissés à la porte de ces anciens Jeux nordiques.
Le cross est l’un des plus vieux sports, la base de l’athlétisme. Il compte de véritable spécialistes et se retrouve, malheureusement, en déshérence depuis quelques années, faute d’exposition médiatique, faute de label olympique. Tout ce que je viens d’écrire s’applique à la lettre au cyclo-cross, autre authentique discipline de saison.
Aux conformistes qui trouveraient cela déplacé ou ridicule, rappelons tout de même que le patinage artistique ou le hockey sur glace furent longtemps organisés dans le cadre des Jeux d’été, et que les pays scandinaves, bastion du ski de fond, luttèrent de toutes leurs forces contre une compétition où ils cohabiteraient avec le ski alpin.
FT