Compteur bloqué à zéro médaille, les Tricolores sont loin de la réussite historique des championnats du monde disputés à Paris en 2003.
Sous un soleil de plomb, mardi soir, dans les coursives du stade Spiridon-Louys, Robert Poirier, le directeur technique national, pressé d’expliquer la déconfiture des Bleus, s’interrompt et empoigne une bouteille d’eau : " J’ai soif. Pour parler, il ne faut pas avoir la bouche sèche. " Effectivement, il va lui falloir user de la salive pour détailler les raisons d’une Berezina provisoire. Explications en quatre points.
Objectif zéro ?
Guère en veine jusqu’à hier dans la chasse aux médailles, l’équipe de France se dirige peut-être vers un nouveau zéro pointé. Comme aux Jeux de Sydney en 2000. À l’époque, aux antipodes, on sortait les couteaux entre membres de la délégation. Le président d’alors, Philippe Lamblin, disait par exemple : " Le problème de l’athlétisme de haut niveau en France, c’est que les gens pensent que tout leur est dû (.). La Fédération est une vache à lait, les groupes d’entraînement lui piquent du pognon et continuent pourtant de la critiquer. "
Quatre ans plus tard, en terre grecque, le discours de son successeur Bernard Amsalem est plus policé mais reste le même sur le fond : " Entre les élus, la direction technique, les entraîneurs fédéraux, les entraîneurs personnels, les managers et les sponsors, trop de monde tient trop de rênes : c’est très perturbant pour l’athlète. Il ne faut plus entre nous des intervenants qui défendent leurs intérêts personnels. Il nous faut de l’unité, de la cohésion et de la communication. " Mardi soir à Athènes, le directeur technique national Robert Poirier avouait à la presse : " Je ne savais pas que Bernard Amsalem avait tenu de tels propos. " La délégation française n’est pourtant pas démunie en téléphones portables.
La faute à pas de chance ?
Huit médailles à Paris et une Berezina en perspective en Grèce. Que s’est-il passé en un an pour que l’athlétisme tricolore perde autant de couleurs ? Il y a la classique explication de " c’est la faute à pas de chance. " Évidemment, Mehdi Baala, médaillé d’argent à Paris en 2003 sur 1 500 mètres, qui se prend les pieds dans une racine à quelques jours des JO, c’est du domaine du hasard. Bonne poire, le DTN Robert Poirier veut bien tout assumer mais pas ça : " Si on veut remettre en cause tout le système à cause d’une foulée ratée sur trois millions, je ne suis pas prêt à assumer. "
Le patron des Bleus préfère avancer quelques explications plus rationnelles, avant de tirer le bilan définitif au terme des jeux le 29 août : " Après les championnats du monde à Paris, certains médaillés se sont enfermés dans l’euphorie comme Marc Raquil, d’autres ont voulu en faire trop, Muriel Hurtis par exemple. " Hurtis, éliminé en demi-finales du 200 mètres, était bien loin de sa troisième place mondiale de Saint-Denis. Raquil, en bronze sur 400 mètres au Stade de France, a jeté l’éponge à la veille des Jeux. Son printemps n’avait été qu’une suite de blessures et de déceptions après un hiver passé à " chanter " sur toutes les ondes. Sur son cas, le DTN est clément : " C’est humain, qui aurait pu résister à un tel défilé de sollicitations et d’honneurs ? "