Combien coûte Tahri ?
Un champion d'exception, ça se paye et ça se monnaye. Mais les athlètes restent les parents pauvres du sport professionnel. D'ailleurs, la toute nouvelle Ligue nationale a lutté pour financer son élite : 36 000 Euros annuels par champion. Bouabdellah y a droit. Ajoutez ce qu'il touche grâce à son contrat d'athlète de haut niveau (aux PTT, entre 1500 et 2000 €), les diverses subventions (42 000 par le Conseil général de Moselle, aux alentours de 15 000 par la Ville de Metz), le financement de son équipementier et les primes (meetings, résultats, records). La fourchette annuelle pourrait se situer de 100 000 à 150 000 €. Une fourchette qui s'explique en partie par le simple fait qu'un certain nombre de revenus dépendent étroitement des performances réussies par l'athlète. Chaque record, chaque podium étant susceptibles de valoir des rallonges de la part des différents partenaires.
Rappel, le salaire mensuel en Ligue 1 de football est de 45 000 €, celui du Portugais Ronaldo (Manchester United) de… 800 000 € !
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La source n'est pas tarie
Entre Metz et Lille, son coeur penche pour la Moselle. Bouabdellah Tahri s'est offert quelques tours de pistes supplémentaires de réflexion. Sa région de toujours a vigoureusement réagi pour lui offrir des conditions de travail à la hauteur de son talent.
Mehdi Baala et Bob Tahri, l'union sacrée à Lille pour l'Alsacien et le Lorrain ? Il n'a pas fermé à double tour la Porte Serpenoise. Le champion messin l'a encore moins claquée au nez d'un environnement qui le soutient depuis sa tendre enfance. Bouabdellah Tahri le sait pertinemment. Tous ses chronos d'excellence, déposés au cours de sa folle course à travers la planète, masquent à peine les marques de soutien dont il a joui dans son club, sa ville, son département. « Il a d'ailleurs volontiers reconnu que nous avons toujours été derrière lui » avance Jean François, le nouveau vice-président délégué aux sports du Conseil général.Si on ne quitte pas son passé comme ça pour se laisser bercer par le vent du nord, il est important de mettre l'accent sur la réaction unanime des élus qui détiennent les cordons des bourses. Tant de reconnaissance ne peut pas laisser la star du 3 000 m steeple insensible. « Nous avons essayé d'être le plus rapide possible dans les négociations. On veut qu'il reste, c'est impératif. Bouabdellah a été reçu au Conseil général, on a travaillé pour qu'il soit avec la Moselle jusqu'en 2012 malgré les propositions alléchantes de l'Agglomération lilloise. »
Le maire de Saint-Jure ne fait pas des promesses à la légère. L'augmentation sensible de sa subvention lui permettra, notamment, d'améliorer ses soins médicaux et sa collaboration avec son entraîneur : « Du moment qu'elle reste raisonnable, nous avons répondu à sa demande avec 42 000 € par an. Ensuite, on est prêt à penser à sa reconversion, à l'accompagner » poursuit Jean François.On a déjà entendu ce discours à la Ville de Metz dans le style il faut sauver le soldat Tahri. Guerre de clans politiques pour empêcher la disparition du joyau de la couronne ? « Non, loin de nous une surenchère quelconque. Le département et la municipalité sont tout à fait complémentaires sur cette affaire. » Selon l'assemblée des élus locaux et l'entourage intime de l'ancien recordman d'Europe, la tendance, hier soir, s'était même inversée. Le futur candidat aux anneaux olympiques ayant laissé transparaître sa satisfaction.
Le son de cloches du beffroi lillois atténue, pourtant, la certitude de voir l'athlète messin rester sur les bords de la Moselle. L'ogre nordiste qui a déjà séduit son champion de copain Mehdi Baala, croit plus que jamais en son professionnalisme et sa puissance financière. Il oublie peut-être un peu vite que la reconnaissance par les siens et la fidélité sont des valeurs pour lesquelles Bouabdellah Tahri perdrait haleine. Metz ou Lille ? Réponse aujourd'hui, demain ou le 8 mai. Jour de la victoire. Mais pour qui… En tout cas, la source des négociations n'est pas tarie. Capital.
Républicain Lorrain