A 30 ans, Arthemon Hatungimana fait figure de vétéran dans le monde du 800 m. Actuellement en stage à Etel, le Burundais, récemment naturalisé français, revient sur ses dix années au plus haut niveau.
Ce qui marque en premier chez Arthemon Hatungimana, c'est son extrême simplicité. Ni son titre de vice-champion du monde du 800 m en 1995, ni ses neuf chronos sous les 1'44'' ne lui ont fait gonfler son tour de tête. « Arthemon, c'est un exemple pour les jeunes et j'ai énormément appris avec lui », assure Bruno Gajer, son entraîneur depuis 2000.
« Rapide mais pas costaud »
Arthemon a commencé l'athlétisme à 13 ans. D'emblée, il s'illustre en bouclant le 100 m en 12'' et 400 m en 55''. Ses qualités de vitesse ne passent pas inaperçues.
Deux ans après ses débuts, il quitte son village pour Bujumbura, la capitale, où il s'entraîne « avec les grands ». La brasserie du Burundi, principal sponsor, lui offre ses premières chaussures. « Avant, je courais pieds nus ou avec des tongs qui se déchiraient tout le temps ».
Malgré une place de demi-finaliste sur 400 m au Mondial junior de Séoul en 1992, le jeune Burundais comprend que son avenir n'est pas sur le tour de piste. « Quand les Américains et les Anglais me doublaient, je tombais avec le vent tellement ils étaient costauds. Moi, j'allais vite mais je n'étais pas assez fort ».
Il est vrai qu'avec ses 64 kg pour 1,80 m, Arthemon n'a pas le profil type du coureur de 400 m. Il passe alors sur 800 m.
« Je ne me suis pas laissé faire par le froid »
Dès 1993, il court en 1'46'' et décroche le bronze aux championnats d'Afrique. « Le jour de ma médaille, le Coopération française m'a détecté et m'a donné une bourse pour aller à l'INSEP ».
A 19 ans, Arhemon arrive à Paris en plein mois de novembre. L'atterrissage fut rude. « Il faisait trop trop froid. J'ai eu beaucoup de blessures à cause de ça mais je ne me suis pas laissé faire ».
Entraîné quelques mois par Roger Milhau puis par José Marajo, le Brundais s'adapte vite. En 1995, il connaît « une année de gloire » avec sa deuxième place aux championnats du monde derrière Kipketer. 1996 fut « une année de malheur ». Une bousculade au Jeux Olympiques d'Atlanta le prive de finale. Il se console en fin de saison en courant en 1'43''46, nouveau record personnel.
Renaissance
La suite est moins drôle. Des blessures à répétition et surtout la perte de sa mère, fin 1998, le déstabilise. Hors du circuit durant deux ans, beaucoup le voyaient fini.
Arthemon rebondit en 2000 grâce à Bruno Gajer. « J'aimais ce qu'il faisait avec Frédérique Quentin et je lui ai demandé de m'entraîner ». L'alliance a été payante puisque le Burundais se qualifie pour les Jeux de Sydney et, surtout, bat son record personnel en 2001 (1'43''38).
« Bruno m'a ressuscité », assure l'athlète qui a participé cet été à ses troisièmes Jeux Olympiques. « J'ai toujours été un athlète fragile. Mais je suis toujours là. De ma génération, il ne reste plus que moi, Kipketer et le Sud-Africain Sepang ».
Devenu français il y a peu, Hatungimana se verrait bien courir trois-quatre ans encore. Et pourquoi pas sous le maillot tricolore. « La France, je lui dois ma carrière. Aujourd'hui, j'aimerais la remercier ».
Arthemon Hatungimana
en bref
Né le 21 janvier 1974 au Burundi
Naturalisé Français en 2004
1,80 m, 64 kg
Vit à Paris
Spécialité : 800 m
Club : Paris Université Club
Entraîneur : Bruno Gajer
Championnats du monde : 2 e en 1995 derrière Wilson Kipketer
Jeux Olympiques : trois participations (Atlanta 1996, Sydney 2000 et Athènes 2004)
Record : 1'43''38 en 2001
Yves-Marie Théréné
Copyright © Le Télégramme 02/12/2004